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14.4.20

Musée de la Rubanerie - "Les grandes orgues rubanières, pour une symphonie allant de… soie ! »

Métier à tisser le ruban de soie, mécanique à barre à 6 navettes, conçu à Saint-Chamond vers 1850  (inv. MRc 015).
Sur la scène du Musée de la Rubanerie, se dresse un imposant « buffet d’orgues textiles. » Composé de pièces de bois chantournées, d’une mécanique aux aiguilles de métal, de cartons dansants et de milliers de cordelettes en suspension, il frappe d’emblée le regard par ses dimensions colossales (500 x 450 x 180 cm). Obtenu à la suite d’un échange, ce métier à tisser des motifs au jacquard provient de la région de Lyon, plus précisément de Saint-Etienne, dans le sud de la France. Datant vraisemblablement de vers la moitié du dix-neuvième siècle, il fonctionnait grâce à une barre actionnée par le tisserand. Cette machine travaillait donc… à domicile ! Pour ce faire, les demeures stéphanoises dévolues au tissage comportaient une particularité : un orifice était ménagé dans le plancher afin de faire passer la couronne du métier à l’étage. On tissait donc dans le salon et on changeait les cartons ou graissait la mécanique dans la chambre à coucher
La région lyonnaise a toujours été célèbre pour son travail de la soie. En effet, cette matière a fait les beaux jours des tisserands et manufacturiers et elle se matérialise dans le soin particulier apporté à la décoration de l’engin. Ici, de nombreux motifs marquetés (c’est-à-dire faits d’incrustations de bois de couleurs différentes dans l’âme du bâti) ou réalisés au tour à bois (pinacles, oves…) en témoignent. Ce qui atteste à la fois de la fierté de l’artisan envers sa profession mais aussi que le métier à tisser, propriété du rubanier, était un des plus beaux meubles, sinon le plus beau, du logis.
D'autres particularités attestent du caractère exceptionnel de la machine et du savoir-faire de ses concepteurs. En effet, chaque contrepoids et chaque lisse (ou anneau à travers lequel passe le fil de chaîne) sont réalisés en verre moulé, matériau depuis belle lurette remplacé par du métal. La proximité avec de grands ateliers de verrerie (comme ceux de Saint-Just-sur-la-Loire, spécialisés dans la réalisation du verre à l’ancienne et pourvoyeurs de chantiers de restauration à l’échelle planétaire) le justifie.
Les rubans que l’on y tissait servaient essentiellement à produire de la sangle usitée pour héler les domestiques dans les châteaux ou les riches demeures. Le Musée en conserve un exemple à travers un motif représentant une licorne entourée de rinceaux. Après avoir servi noblement au domicile du tisserand, la machine a été partiellement amputée (on lui a enlevé sa barre) puis mise en usine où, par le biais d’arbres et de poulies de transmission, la force vapeur a remplacé les bras de l’homme. Banalisé, sorti de son contexte historique et humain, le meuble avait perdu de sa signification jusqu’à ce qu’il soit remis en valeur à la place d’honneur du Musée de la Rubanerie cominoise, en attendant une restauration future garantissant l’historicité de l’œuvre. Il rappelle encore que Comines s’essaya au tissage de la soie naturelle à la fin du XIXe siècle. La Rubanerie a d’ailleurs introduit une demande de classement de ce bien unique auprès du Ministère de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique. Affaire à suivre…
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Olivier CLYNCKEMAILLIE
Conservateur/directeur, Délégué général chez Musée de la Rubanerie cominoise

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